Créer un site multilingue demande du temps et de l’énergie. Dans notre petit pays, entreprises et organisations ne peuvent pourtant s’en passer si elles ont des visées sur l’entièreté du territoire. Hélas, beaucoup essaient de s’acquitter de cette obligation à moindre coût, avec un résultat souvent désastreux.  If you pay peanuts, you get monkeys, dit un adage anglo-saxon: « si vous payez des cacahuètes, vous emploierez des singes ». En clair, la qualité a un prix. Pourtant, de nombreuses entreprises tentent encore de réduire leurs coûts en commandant des traductions au rabais. Un exemple récent m’a particulièrement interpellé: celui de Custo, la fédération des entreprises actives dans le Custom Publishing.

Vous avez dit « Custom Publishing »?

Un petit mot d’explication pour les lecteurs de ce site qui ne seraient pas familiers de l’univers merveilleux du marketing et de la communication. Le custom publishing est l’activité qui consiste à publier du contenu pour le compte d’un donneur d’ordre, contenu généralement estampillé à la marque de ce donneur d’ordre. Cette activité regroupe principalement la réalisation de magazines d’entreprise destinés au personnel ou aux clients et prospects, mais, digitalisation oblige, elle concerne aussi la création de newsletters, l’animation de blogs, et cetera.

Qualité et sérieux

En principe, les spécialistes de ce secteur sont extrêmement pointilleux sur la qualité de leur travail. Pour en avoir parmi mes clients, je sais qu’ils portent énormément d’attention à l’exactitude des contenus qu’ils livrent à leurs clients, à l’orthographe irréprochable des textes, à l’absence de coquilles, au soin apporté à la mise en page, mais aussi à la qualité des traductions qu’ils fournissent. La plupart des magazines sont en effet publiés en deux, voire en trois langues. Certains custom publishers vont même jusqu’à s’assurer que la répartition des rédacteurs par rôle linguistique est identique à la répartition de leur lectorat, de sorte que suffisamment de textes soient rédigés par un native speaker.

Les cordonniers les plus mal chaussés

Malheureusement, l’organisation qui regroupe ces entreprises ne semble pas partager leur souci de perfection. Rédigé à l’origine en Néerlandais, leur site internet a manifestement été traduit à la va-vite par un traducteur peu expérimenté. Voici donc ce que donne leur page d’accueil:

Le portal du Content Marketing

La fédération Custo réunit les bureaux du Content belges principaux avec le objectif commun: donnez au Content Marketing la place qu’elle mérite en tant que outil de marketing complet, créatif et professionnel. De leur expérience dans l’édition les membres Custo connaissent mieux que quiconque comment on peut créer du contenu pertinent et attrayant.
Lorque nous avançons avec notre temps. Nous sommes passés de créateurs de magazine aux créateurs de contenu.
Dans le secteur du Content Marketing différents outils sont utilisés tels que des applications, e-zines, magazines, vidéos, sites Web … au but de faire passer le message. Un tas de possibilités mais le plus important c’est de retenir que l’outil est secondaire par rapport à son contenu. L’accent est mis sur raconter votre histoire ou si vous êtes une entreprise, une marque, un gouvernement ou organisation. Prêt à faire le grand saut? Ensuite, choisissez votre propre stratégie de marketing de contenu avec le label de qualité Custo. Vous pouvez être sûr qu’il est fait par des professionnels qualifiés, selon les règles de l’art.

J’ai mis en rouge les fautes de grammaire et d’orthographe les plus évidentes, mais j’aurais pu tout aussi bien rougir l’ensemble de ce paragraphe. Evidemment, c’est d’autant plus piquant que le texte parle de création de contenu « par des professionnels de qualité » et « selon les règles de l’art ».

Quelles conséquences?

Je vous avoue que ce qui me laisse le plus perplexe n’est pas ce morceau de bravoure littéraire, mais bien l’apathie des membres de l’association en question. Comment un custom publisher digne de ce nom peut-il accepter de voir ainsi sa réputation mise en danger par la piètre qualité de la vitrine web de  l’association censée le représenter ? Cette chronique est donc aussi une bouteille à la mer. Sa diffusion, que j’espère aussi large que possible, va-t-elle pousser Custo ou ses affiliés à réagir? Je ne manquerai pas, chers lecteurs, de vous tenir au courant.